Trônant au cœur de la salle d’enseignement, il est devenu incontournable depuis près de trois ans. Mais connaissez-vous la genèse du Bouddha de l’Institut ? Découvrez dans cet article l’ultime étape : les rituels de consécration de la statue.
En avril 2015, l’annonce de la venue de Thayé Dorjé, Sa Sainteté le XVIIe Gyalwa Karmapa, au cours de l’été suivant a accéléré l’activité des ateliers mantras de Kundreul Ling et de Dhagpo. C’était l’occasion parfaite pour qu’il mène le rituel de consécration (rabné en tibétain) qui donnerait vie à la statue !
Cette heureuse nouvelle s’accompagna donc d’une ribambelle de préparatifs nécessaires à l’évènement. Sachant qu’une statue consacrée ne doit plus être déplacée, hormis cas vraiment exceptionnel, lama Jigmé Rinpoché demanda que son autel définitif soit réalisé. Celui-ci, 100% made in Dordogne, a été fabriqué à Périgueux. Façonné dans du bois de chêne et revêtu d’un mélange de pierre naturelle et de résine, il a été livré quasiment complet la veille du rabné ; il ne manquait en fait que la roue du Dharma centrale, qui sera en bois recouvert de feuilles d’or.
Quelques jours avant la date fixée pour le rabné qui devait être mené par Karmapa, tous les éléments voués à remplir la statue – rouleaux de mantras, sokshing (1) et autres substances de toutes sortes – ont été réunis pour un premier rituel de consécration exécuté par des lamas, drouplas et monastiques. Ce rituel, appelé zungdrup, a duré trois jours pendant lesquels les pratiquants ont accumulé un mantra 800 000 fois tout en visualisant que les substances et rouleaux étaient bénis par les bouddhas et les bodhisattvas. Ce premier rituel a pris fin le matin du lundi 27 juillet 2015 en présence de Karmapa lui-même, venu participer à l’achèvement de l’accumulation des 800 000 mantras.
Dès lors, les substances étaient prêtes à prendre place à l’intérieur de la statue ; il n’était donc plus question d’en ajouter, ni même de les toucher directement sans porter des gants ! Le remplissage de la statue a par la suite mobilisé trois personnes pendant deux jours, tandis que Karmapa enseignait à quelques mètres de là, sous le chapiteau. Le moindre espace a été comblé, depuis le coussin jusqu’à la tête, en passant par les jambes, le torse, etc. Le sokshing a été placé par Karmapa lui-même ; occupant la place centrale, il se dresse droit depuis le nombril jusqu’au sommet du Bouddha. Ce remplissage a été rendu possible par la présence de trappes s’ouvrant à divers endroits de la statue ; à la fin, elles ont été scellées et Gérard Guinot, le sculpteur, a pu faire les dernières retouches de dorure. La veille du rabné, juste avant que la statue ne soit installée sur son autel définitif, Karmapa est venu placer les tout derniers rouleaux de mantras sous la protubérance crânienne du Bouddha et y glisser des enveloppes dont le contenu est connu de lui seul… Ce geste marquait la fin du remplissage.
Après ces deux années de préparation, le grand jour arriva enfin ! Le 31 juillet 2015, Karmapa accomplit le rabné, pour la statue mais également pour l’ensemble de l’Institut, aux côtés de nombreux lamas, drouplas et monastiques.
Rabné fait référence au fait d’« implanter » ; en l’occurrence, il s’agit d’« ancrer la divinité » dans un support – ici la statue. Malgré les rituels qui l’ont précédée, on considère que la consécration du support n’est effective que lorsqu’un grand maître (comme Karmapa ou Kunzig Shamar Rinpoché) l’accomplit. Dès cet instant, tout ce qui sera réalisé devant ce support, qu’il s’agisse d’offrandes ou de pratiques, donnera le même fruit que si cela était fait devant le Bouddha lui-même ! Cet instant précis, c’est celui où l’écran, qui s’était substitué à la kata voilant le visage du Bouddha depuis le moment où il a été peint, s’est levé : les « yeux ouverts », la statue est alors comme vivante, indifférenciée des trois joyaux. C’est aussi l’instant où elle est devenue un véritable support de pratique. Ainsi, si ce moment conclut la genèse du Bouddha de l’Institut, il marque aussi le début de son histoire, de son rôle au sein de la grande salle d’enseignement.
Merci à Loïc, à Tashi, aux lamas et drouplas de Dhagpo et à droupeun Tenzin pour leur contribution à la préparation de cet article !
(1) Pour une explication de ce terme, cf. Le Bouddha de l’Institut 2/4 – « De l’atelier mantras au remplissage ».
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