"Le bouddhisme est un mode de vie par lequel nous développons les qualités de notre esprit.
C’est un mode de vie très particulier, car c’est une façon d’atteindre le bonheur
sans nuire à autrui."

LE XVIIe GYALWA KARMAPA, TRINLEY THAYÉ DORJÉ

Paroles du 17e Gyalwa Karmapa, Trinley Thayé Dorjé

Retrouvez l'intégralité des communications du Karmapa disponibles en français
sur le site de la FFCBK (Fédération Française des Centres Bouddhistes Karma-kagyu)

Je souhaite fortement que les immolations s’arrêtent vite
Article issu de l’Hindustan Times du 13 décembre 2012 - Par Lalita Panicker


Les immolations pour la cause du Tibet ont couté la vie à 28 personnes au cours du seul mois de novembre. Le nombre total de morts depuis que ce mode de protestation est apparu s’élève à 90. Cependant, tous les directeurs spirituels tibétains ne sont pas d’accord avec cette méthode. Au cours d’une interview exclusive publiée au niveau national pour l’
Hindustan Times, Sa Sainteté le 17e Karmapa, Trinley Thayé Dorjé, à la tête de la lignée karma kagyü du bouddhisme tibétain, a dit que le nombre croissant d’immolations lui causait une grande inquiétude.


« Il ne s’agit en aucun cas d’une pratique bouddhique. Je souhaite fortement que cela cesse vite. La pratique du Dharma bouddhique est notre meilleur héritage, pour nous les Tibétains. Elle nous enjoint de préserver l’existence humaine : c’est, en effet, grâce à elle que nous sommes capables d’atteindre la libération. »


Il dit que le Bouddha lui-même a déclaré que nous devons prendre soin de ce corps et avoir une conscience claire. Une immolation ne fait pas seulement souffrir une personne, mais elle crée également de la confusion dans l’esprit des autres.
« L’existence humaine est comme un temple. Nous devons chercher des méthodes non violentes… Nous devons calmer notre esprit ; l’esprit s’échauffe lorsqu’émergent des émotions négatives et cela conduit à des actions violentes. »


Karmapa explique qu’il a très peu de connaissance et d’intérêt en matière de politique, qu’il s’agisse de la politique indienne ou chinoise, et il pense que la véritable dévotion aux pratiques bouddhiques, qui implique compassion et sagesse, montrera à tout le monde un chemin dépassant les dilemmes.

 

Lorsque nous lui demandons s’il ne regrette pas que le Dalaï-lama ne le reconnaisse pas comme la réincarnation du lama karmapa — il soutient Orgyen Trinley Dorjé qui vit à Dharamsala —, Trinley Thayé Dorjé répond qu’il a un immense respect pour l’érudition du Dalaï-lama en matière de bouddhisme.

 

Quand nous lui demandons s’il y a un conflit d’intérêts entre lui-même et l’autre karmapa, il répond qu’il y a eu des différends, mais qu'aujourd’hui son inquiétude principale est la pratique des immolations et que c’est ce qui lui cause le plus de souci.

 

Voici ci-dessous son interview.

 

Jusqu’à présent, il y a eu 90 immolations de Tibétains en signe de protestation et en faveur de la libération du Tibet de la domination chinoise. Au cours du seul mois de novembre, il y a eu 28 morts. Quelle est votre position à ce sujet ?

En tant que Tibétain, né au Tibet, cette escalade d’immolations est une cause de grande inquiétude pour moi. Nous, les Tibétains, sommes connus pour notre spiritualité, pour notre pratique de la compassion et de la sagesse, pour notre pratique du Dharma bouddhique. C’est notre plus grand héritage. Je suis choqué que des Tibétains accomplissent de tels actes. Je pense fortement que cela doit s’arrêter, il ne s’agit en aucun cas d’une pratique bouddhique.

 

Pourquoi, selon vous, de plus en plus de personnes ont-elles recours à cette méthode de protestation ?

Je dirais que nous avons recours à ces moyens drastiques lorsque notre esprit est échauffé par les émotions. Nous perdons alors le contact avec notre héritage spirituel. Nous avons besoin de calmer l’esprit, afin de pouvoir contrer ces situations.

 

Quelle forme de protestation conseilleriez-vous ?

De nouveau, je parle d’un point de vue spirituel. Nous avons besoin de revenir à nos pratiques spirituelles. Lorsque nous nous sentons confus et troublés, nous devons essayer de traiter la situation avec nos valeurs spirituelles afin de trouver des moyens qui ont du sens.

 

Comment pouvez-vous attirer l’attention sur une cause de cette façon ?

Lorsque l’esprit est clair, lorsque les outils que nous utilisons sont transparents, nous pouvons accomplir ce que nous souhaitons. Nous devons revenir à notre mode de vie tibétain pour apporter clarté et bonheur. Si nous parvenons à le faire, nous pourrons accomplir ce que nous voudrons.

 

Cela vous ennuie-t-il que le Dalaï-lama ne vous reconnaisse pas comme une incarnation authentique ?

En tant que Tibétain, né au Tibet, j’ai le plus grand respect pour le Dalaï-lama. C’est un grand érudit en philosophie bouddhique et un grand érudit de manière générale.

 

Pourquoi êtes-vous si véhément au sujet des immolations et de leur aspect négatif ?

Dans le Dharma bouddhique, on nous enseigne de préserver l’existence humaine. Grâce à cette existence, nous pouvons accomplir des choses merveilleuses, nous pouvons atteindre la libération. Le Bouddha lui-même a dit que nous devons prendre soin de ce corps et maintenir une conscience claire. Une immolation ne fait pas seulement souffrir une personne, mais elle crée également de la confusion dans l’esprit des autres. Nous devons nous rappeler d’où nous venons. Nous devons nous rappeler notre philosophie. La non-violence ne peut émerger de mesures aussi drastiques. L’existence humaine est comme un temple et aussi longtemps que nous vivons une existence humaine, nous devons développer ce corps physique.

 

Le Premier Ministre tibétain en exil, sans prendre la responsabilité des immolations, a dit qu’il s’agissait du devoir sacré de chaque Tibétain de soutenir les immolations pour la cause du Tibet. Que pensez-vous de cette prise de position ?

Je suis sûr qu’il a de bonnes intentions, mais ma vie est vouée à la spiritualité. Les Tibétains sont connus pour leur spiritualité et leur compassion, aussi mondaine et limitée soit-elle. Grâce à notre pratique du bouddhisme, nous sommes allés loin dans la compréhension et la paix. En ce moment, les immolations recueillent une approbation quasi générale. Ma voix est peut-être la seule qui s’élève contre cela, mais en tant que Tibétain, il est de mon devoir de vous livrer mes pensées et mon point de vue sur le sujet.

 

Vous êtes en Inde depuis longtemps, quelle est votre expérience ?

J’ai reçu ici une merveilleuse hospitalité. J’ai la liberté de pratiquer ma spiritualité, ce qui représente pour moi la plus grande des libertés.

 

Pensez-vous que le nouveau régime en Chine améliorera les choses au Tibet ?

J’ai très peu de connaissance et d’intérêt pour la politique. Je suis un pratiquant spirituel.

 

Les gens vous traitent comme un dieu vivant, comment vivez-vous cela ?

La vie est impermanente, on peut faire l’expérience de différents modes de vie. J’essaie de suivre ma pratique du mieux que je peux, mais c’est en effet un grand défi. Lorsque l’esprit s’échauffe, la meilleure des choses est de revenir à sa pratique spirituelle.

 

Y a-t-il un conflit d’intérêts entre vous et l’autre karmapa ?

Il y a eu des différends, mais pour le moment mon inquiétude principale concerne les immolations. Je ne peux imaginer aucune vie en dehors de la spiritualité.

 

Vous n’aviez qu’un an et demi lorsque vous avez déclaré être le karmapa. Avez-vous des souvenirs de cela ?

J’ai des souvenirs, oui. Cela fait partie de notre spiritualité. Nous avons des souvenirs de nos renaissances, de nos réincarnations. Grâce à la méditation, nous pouvons nous rappeler nos vies passées. Malheureusement, nous sommes parfois trop occupés pour méditer et nous souvenir de nos vies antérieures !

 

N’avez-vous jamais eu de doutes au sujet de votre mission, de vous-même ?

Oui, il y a des doutes, de l’anxiété, des peurs, cela fait partie de ce monde. Il n'est pas possible de se fier aux doutes ; si nous le faisons, nous pouvons être amenés à prendre des décisions drastiques. Il est important de rester concentré autant que possible sur le côté positif, afin de s’équilibrer.

 

Selon vous, le bouddhisme est-il une religion ou une philosophie ?

Il y a de nombreux angles d’approche. Il y a un aspect rituel dans le bouddhisme, mais c’est aussi une façon de vivre. Nous devons parvenir à la compréhension du sens de la vie et du bien que nous pouvons apporter. Nous devons simplifier les choses et nous concentrer sur ce qui est important. Nous devons connaître nos priorités, nous devons aider les autres et maintenir notre esprit et notre corps loin des actions et des émotions perturbatrices.

 

Vous avez parlé des trois poisons : l’avidité, l’ignorance et la colère. Comment les dépasser ?

Au moyen de la spiritualité. Au moyen de la méditation. C’est ainsi qu’on voit les choses plus clairement. Comme une eau calme, sans ondulations ni bulles. Nous devons être calmes, analyser les choses et comprendre l’éthique, afin de l’appliquer dans des situations comme les immolations.

 

Est-ce que la croyance en la réincarnation réduit la peur de la mort ?

C’est une solution temporaire. Il faut atteindre un état de conscience où nous ne connaissons plus aucune peur, nous ne devons pas avoir peur, qu’il y ait ou non des renaissances. Si croire en la réincarnation aide à réduire la peur, c’est bien ; cependant, nous devons être sûrs que nous atteindrons un état sans aucune peur.

 

Quel est votre message aujourd’hui pour les Chinois, les Indiens et les Tibétains ?

Nous devons nourrir des pensées bienveillantes et entreprendre des actions positives. Il est important de continuer sur le chemin de la vertu.

 

Pensez-vous que le Tibet sera libre un jour ?

Cela dépend de l’application de notre héritage spirituel, nous devons adopter des moyens bienveillants, pas des mesures drastiques.

 

Que faites-vous pendant votre temps libre ?

Je n’ai pas beaucoup de temps libre, mais j’essaie de me tenir au courant des divertissements et de l'actualité, afin de mieux me relier à mes étudiants pratiquants spirituels.

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