"Le bouddhisme est un mode de vie par lequel nous développons les qualités de notre esprit.
C’est un mode de vie très particulier, car c’est une façon d’atteindre le bonheur
sans nuire à autrui."

LE XVIIe GYALWA KARMAPA, TRINLEY THAYÉ DORJÉ

Revue "Tendrel"

Retrouvez sur cette page des enseignements parus dans la revue "Tendrel" éditée par Dhagpo Kagyu Ling jusqu'en 2002.

Les six paramitas - La générosité

Guendune Rinpoché

Les six paramitas ou vertus transcendantes constituent le coeur de l'entraînement
sur le chemin du Grand Véhicule, le Mahayana. Ce sont : la générosité, l'éthique,
la patience, la persévérance (énergie enthousiaste), l'absorption méditative et la sagesse
(conscience transcendante). S'appuyant sur le dynamisme des relations entre les êtres,
elles sont l'instrument de l'intégration de l'enseignement dans la vie quotidienne en
action.

Considérées dans leur succession, l'une est la base permettant à la suivante de se
développer. Formant en fait un tout indissociable, elles sont complètement interdépen-
dantes, chacune d'entre elles étant purifiée par les cinq autres. Elles vont ainsi toutes se
développer simultanément sur le chemin de l'Eveil.

Le texte qui suit correspond au début de l'enseignement sur les Paramitas donné
par Guendune Rinpoché en juillet 85, se basant sur le "Joyau Ornement de la
Libération", ouvrage composé par Gampopa. Il traite de la première des vertus trans-
cendantes : la générosité.

Les êtres ordinaires sont le fondement de la pratique des
paramitas. En effet, s'il n'y avait pas d'êtres démunis, il
ne serait pas possible de pratiquer la générosité. Si les
autres n'existaient pas, il n'y aurait pas d'opportunité de
développer l'éthique, la base de l'éthique étant la conduite
juste qui s'abstient de nuire à autrui. S'il n'y avait pas d'êtres
négatifs, personne ne chercherait à nous nuire et on n'aurait
aucun moyen d'exercer la patience et la tolérance. Afin de
pouvoir pratiquer et mener à leur terme ces différentes vertus,
il est nécessaire de faire preuve de persévérance. Il faut donc
appliquer la quatrième paramita : l'énergie enthousiaste. Si on
ne développe pas ensuite les absorptions méditatives, nos
qualités positives seront instables. Afin de comprendre toutes
les qualités et de leur donner une dimension ultime, on fait
s'épanouir la dernière paramita : la conscience transcendante
ou sagesse.
La générosité est définie en sept points qui vont être
développés successivement :

- les défauts et les qualités qui naissent de la non-pratique et de
la pratique de la générosité,
- l'explication de son essence,
- la classification,
- les caractéristiques essentielles de chacune de ces classes,
- la façon de l'accroître,
- la façon de la rendre parfaitement pure,
- le résultat qui est obtenu à travers sa pratique.

L'inconvénient de ne pas être généreux

Celui qui ne possède pas cette vertu de générosité rencon-
trera la situation d'être sans cesse démuni. C'est l'expérience de
la pauvreté. Pour la plupart des êtres qui n'ont aucune généro-
sité, la conséquence est une naissance dans le monde des esprits
avides. Ceux qui obtiendront une renaissance humaine seront
soumis à des conditions d'existence difficiles, au dénuement.
Le Bouddha l'exprime dans un Soûtra : "Celui qui est avare
prendra naissance comme esprit avide et même s'il obtient une
naissance humaine, il passera sa vie dans la pauvreté." Dans
l'explication sur le Vinaya : "L'être qui est prisonnier de la
cupidité et de l'avarice, qui n'a pas la capacité de produire la
moindre générosité, sera conduit à prendre renaissance en tant
qu'esprit avide et à expérimenter la faim et la soif. L'absence
de générosité est la cause principale de renaissance dans le
monde des esprits avides."

Si on est dénué de générosité, on ne possède pas non plus
d'aptitude à accomplir le bienfait des êtres et on ne pourra pas
obtenir l'Eveil. Ceci est expliqué par le Bouddha : "Celui qui
ne peut pas pratiquer la générosité sera dépourvu de jouissance
matérielle et n'aura pas davantage la capacité d'attirer à lui et
de rassembler les êtres, et il est donc inutile de parler de sa
compétence à réaliser l'Eveil."

Les avantages de la générosité


Celui qui est capable de générosité jouira dans toutes ses
existences de conditions matérielles favorables et obtiendra le
bonheur. Ceci est exprimé par le Bouddha dans un Soûtra :
"Le bodhisattva qui pratique la générosité tranche toute
possibilité de renaître en tant qu'esprit avide ; il tranche
également toutes les émotions qui naissent de l'état de pauvreté
et de dénuement ; et, à travers cela, il crée l'obtention de biens
et de jouissances illimités... Celui qui s'efface de façon juste
dans la pratique de la générosité n'aura pas de meilleur ami que
cette vertu transcendante du bien."

Ceci est illustré par Shantideva dans "La voie dans
l'entrée médiane" (Madyamika) : "Celui qui aspire au
bonheur devra jouir de conditions matérielles excellentes. Tant
qu'il ne réunira pas ces conditions, il lui sera extrêmement
difficile de posséder le bonheur. Pour cette raison, le Bouddha
a d'abord enseigné la pratique de la générosité, comme étant la
base de toutes les autres obtentions."

Les bienfaits de la générosité sont d'obtenir les capacités et
les moyens d'agir pour le bien des autres. Celui qui rassemble
toutes les formes de don s'établit fermement dans le Dharma et
a la possibilité d'y conduire les autres êtres. Le Bouddha dit :
"Par la pratique de la générosité, l'individu transforme toutes
les situations et fait ainsi mûrir les êtres... Celui qui est
généreux obtient facilement la réalisation de l'insurpassable
Eveil... Celui qui pratique la générosité obtiendra des posses-
sions... alors que celui qui garde jalousement pour lui ses
acquisitions en sera dépossédé... Celui qui pratique la généro-
sité est au cúur même des bienfaits, celui qui ne la pratique pas
est en dehors de leur essence, son activité est inutile. Celui qui
pratique la générosité n'a pas besoin de chercher une protection
contre la souffrance ; celui qui ne la pratique pas doit
s'efforcer de se protéger contre toutes sortes d'afflictions."

Qui pratique la générosité ne connaît aucune peur. Qui ne
la pratique pas est sans cesse en butte aux conflits, aux
difficultés, à l'agression et à de nombreuses frayeurs.

Qui pratique la générosité montre rapidement le chemin de
l'Eveil. Qui naît sans générosité démontre tout aussi rapide-
ment le chemin démoniaque.

Pour celui qui est généreux, toutes formes de jouissances
positives seront illimitées, alors que pour celui qui est sans
générosité elles seront très vite épuisées. Cela signifie, dit
Rinpoché, que celui qui n'est pas attaché à ses possessions et
qui pratique la générosité obtiendra des causes de bonheur sans
fin, illimité. Tout ce que nous expérimenterons au moment de
notre mort sera le résultat de cette vie, de la façon dont nous
aurons orienté notre esprit. Si nous sommes attachés à nos
possessions et à nos biens, cela créera beaucoup de voiles dans
l'esprit. Au moment où on quittera ce corps physique, les
obscurcissements demeureront et on sera alors sans liberté.

Nous serons impuissants à transformer cette situation car nous
n'aurons rien fait pour cela ; c'est à dire que dans le courant de
notre vie nous n'aurons pas créé de conditions vertueuses à
travers le corps, la parole et l'esprit et on se retrouvera donc
extrêmement pauvre et démuni ; à ce moment là on perd tout ce
que l'on avait.

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A l'inverse, même s'il connaît des difficultés dans le cours
de son existence, celui qui pratique les vertus positives se
trouvera à la fin de sa vie extrêmement riche et fortuné parce
qu'il aura créé les vraies conditions du bonheur, tout le reste
n'étant qu'illusoire et transitoire ; il n'aura pas à souffrir long-
temps de ces circonstances présentes car il aura travaillé à
l'obtention d'un bonheur définitif.

II) L'essence même de la générosité

Cette essence est sans attachement à aucune forme ni
expression et est libre de la fixation et de la saisie réaliste. Ceci
est expliqué dans l'ouvrage "Les Terres de Bodhisattvas" :
"Quelle est l'essence de la générosité ? C'est un état d'esprit
qui est sans attachement et qui produit les relations spontanées
avec le monde et les êtres. [Elle est exprimée par] celui qui est
capable de donner tout ce qu'il possède parce qu'il a rejeté
toute chose comme ayant une existence propre, comme étant
réelle par nature."
III) La classification de la générosité

II y a trois formes de générosité :
- la générosité matérielle : elle consiste à aider les êtres du point
de vue matériel ; elle est en relation avec le corps.
- la générosité de l'absence de peur : c'est la générosité amenant
à protéger la vie des êtres ; c'est ce qui s'établit en relation avec
la force vitale.
- la générosité du saint Dharma : c'est la générosité qui
s'applique directement à la relation avec l'esprit des êtres.

IV) Les caractéristiques essentielles
de chacune de ces classes

1 - LA GENEROSITE MATERIELLE

La générosité pure doit être pratiquée à tout prix et la géné-
rosité impure abandonnée.
Les formes de
la générosité impure


Elles s'expriment à quatre niveaux : état d'esprit, substance
(l'objet donné), réceptacle et manière d'accomplir le don.


A - LA GENEROSITE LIEE ¿ UN ETAT D'ESPRIT IMPUR

- soit venant d'une intention contraire
II y a générosité provenant d'une attitude négative lorsque
l'on donne pour nuire sciemment, pour devenir célèbre et avoir
un retour dans cette vie, ou encore lorsque cela représente une
forme de rivalité et de compétition avec les autres.
Ces trois formes de générosité impropre doivent être aban-
données par le bodhisattva. Cela est exprimé dans les écritures
("Les terres de bodhisattva") : "Le bodhisattva est celui qui ne
pratiquera pas une forme de générosité conduisant soit à tuer
d'autres êtres, soit à les emprisonner, soit à les punir ou les
condamner, soit à les expulser ou les bannir... Le bodhisattva ne
pratiquera pas le don dans l'espoir d'être célèbre et loué... Le
bodhisattva ne pratiquera pas pour rivaliser ou se mettre en
compétition avec les autres."

Dans ces trois types de générosité, on essaie de prendre de
l'ascendant par rapport aux autres, d'acquérir du pouvoir.
- soit venant d'une pensée inférieure
Deux formes sont à abandonner par le bodhisattva : la
première, c'est de pratiquer le don par peur de la pauvreté dans
les vies futures ; la seconde, c'est de pratiquer la générosité dans
le but de jouir ultérieurement de richesses, de l'obtention d'un
statut, etc.

Le Bouddha dit : "Le bodhisattva refusera de pratiquer une
forme de générosité basée sur la peur de rencontrer la pauvreté...
Le bodhisattva ne pratiquera pas la générosité dans le but de
parvenir à la richesse ou à des incarnations telles que le dieu
Indra ou les monarques universels."

B - LA GENEROSITE LIEE A L'OBJET DONNE IMPUR
Le bodhisattva ne pratiquera pas la générosité à travers le
don de substances comme le poison, les armes, toutes sortes
d'objets qui peuvent être nuisibles à soi-même et aux autres.

Ce n'est pas uniquement dans l'objet que l'on offre que
réside l'impureté, mais aussi dans la motivation de l'offrande.
Par exemple, la motivation peut être erronée. Le Bouddha
exprime cela : "Si le poison peut être utile, bénéfique à
quelqu'un, alors, bien que ce soit du poison, il faudra l'offrir. Si
on offre des nourritures extrêmement fines mais susceptibles de
nuire à la personne, alors on ne pratiquera pas une telle généro-
sité.... De même que l'on devra couper à une personne son doigt
mordu par un serpent afin de lui sauver la vie, de la même
manière si l'on doit agir en sachant que c'est désagréable mais
bénéfique, il ne faut pas hésiter. "

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Tout objet pouvant devenir une cause de souffrance pour
les êtres ne doit pas servir comme source d'offrande. On
n'offrira pas non plus son père et sa mère, ni quelque chose qui
peut provoquer la déchéance de ses parents, ni un de ses enfants,
ni sa femme si elle n'est pas d'accord. Si on a beaucoup de
possessions matérielles, on ne fera pas d'offrande médiocre ; au
contraire on offrira beaucoup. Inversement, on n'offrira pas des
biens gardés dans un but précis pour accomplir quelque chose.
Ceci fait référence, dit Rinpoché, au fait que l'on pouvait
demander au bodhisattva son corps ou une partie de son corps
pour en faire un usage négatif, notamment utiliser cette offrande
pour contrer des êtres et procéder à des actes propitiatoires
auprès d'esprits négatifs. Ces formes de dons nuisibles ne sont
pas appropriées.

C - LA GENEROSITE LIEE A UN RECEPTACLE IMPUR

De la même manière, on ne pratiquera pas la générosité
envers des êtres qui sont soumis à des influences négatives,
démoniaques ou autres ; on ne fera pas don de son corps ou de
ses biens d'une manière qui va nourrir la folie ou le
déséquilibre des êtres. Si on s'aperçoit qu'une forme de
générosité apporte davantage de troubles pour quelqu'un, on
s'en abstiendra. "On ne donnera pas de nourriture à des êtres
lorsqu'ils sont repus, gloutons... On ne donnera pas de boisson
à des êtres qui ont suffisamment et qui demandent simplement
par gourmandise."

 

D - LES MOYENS DE DONNER IMPURS
On ne pratiquera pas la générosité si on est dans un état
d'esprit négatif, si on le fait à contrecúur, par haine ou par
colère. On ne donnera pas non plus avec une attitude mépri-
sante ou irrespectueuse, expression de l'orgueil. Si on pratique
la générosité envers un mendiant, on le fera sans se moquer de
lui, sans le réprimander, le critiquer ni dévoiler son état pour
l'humilier.

Ainsi sont regroupées les façons impures de pratiquer la
générosité.

Les formes de
la générosité pure

A - L'OBJET DONNE

Il existe deux substances d'offrande : intérieure et exté-
rieure.

- L'offrande intérieure
C'est offrir son propre corps. Dans les Soûtras, il est dit
"que si on en a la possibilité et que c'est nécessaire, lorsque
l'on nous demande notre main, il faut donner une main ; si on
demande une jambe, il faut la donner ; si on demande l'úil, il
faut donner l'úil ; si on demande la chair, il faudra donner la
chair ; si on demande le sang, il faudra donner le sang."
Néanmoins, pour les bodhisattvas débutants qui n'ont pas
encore complètement uni leur esprit à l'indifférenciation de soi
et des autres et qui n'ont donc pas réalisé la vacuité parfaite, il
sera difficile de donner une partie de leur corps. A ce moment
là, ils devront pratiquer l'offrande intégrale du corps mais ne
devront pas se séparer d'un de leurs membres ou de leurs or-
ganes.

Ce que cela signifie, dit Rinpoché, c'est que tant que l'on
est dans la dualité "moi/les autres", deux formes d'intention
s'affrontent : notre propre pensée, notre propre désir et la
volonté de celui qui est en face de nous, et ces deux intentions
sont souvent contraires. Tant que l'on demeure dans cette
relation séparée entre soi et autrui, il faut pratiquer jusqu'à
être capable d'échanger ses propres désirs avec ceux des autres et
de faire place à la volonté des autres plutÙt qu'à la sienne. Il
faut s'entraîner à ce renversement. Pour cette raison, tant que
l'on n'a pas réalisé la complète équanimité de soi-même et
d'autrui, il ne sert à rien de donner une partie de soi si on est
attaché à un "je". Tant que l'on a une saisie égocentrique très
structurée, si on veut pratiquer quelque chose qui est trop
difficile, cela ira contre le progrès spirituel, créera simplement
davantage de souffrances et renforcera encore cette saisie
égoÔste. On peut pratiquer le don de son corps et de ses
membres dans la mesure où cette pratique anéantira
complètement toute forme de saisie égoÔste.

Il est dit dans le Bodhicharyavattara : "Lorsque, partant
d'une bonne intention, mais sans avoir une réalisation consé-
quente, on veut donner son corps, ceci est une erreur et on
devra s'en abstenir. Au contraire, on devra d'abord utiliser ce
corps pour aider les êtres et pour la réalisation de la pratique
permettant d'obtenir les parfaits moyens d'accomplissement
du bien d'autrui."

- L'offrande extérieure

II s'agit de tous les objets extérieurs au corps qui sont
dignes d'offrande : des boissons, des vêtements, etc., toutes
choses qui nous appartiennent en propre.

Le bodhisattva "maître de maison" ou laÔc qui ne fait pas
don de son corps ou de ses biens n'est pas un bodhisattva. Il est
dit que ceux qui ont pris des vúux sous une forme ou sous une
autre doivent pratiquer la générosité et donner absolument
tout, sauf les trois robes monastiques. Si on donnait ces robes,
cela nuirait au bien des êtres.

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B - LE RECEPTACLE DU DON

II y a quatre types de réceptacles :
- ceux qui sont l'expression spécifique vers qui on peut
pratiquer la générosité : les lamas,
- ceux à qui la générosité sera particulièrement utile : les parents,
- ceux vers qui la générosité s'exprimera parce qu'ils souffrent,
- ceux à qui elle s'appliquera parce qu'ils sont des ennemis qui
cherchent à nous nuire.

C - LA MANI»RE DE PRATIQUER CETTE G…N…ROSIT…

L'intention doit être pure et la façon de donner excellente.
L'intention pure repose sur l'amour altruiste et la
compassion qui nous amènent à pratiquer la générosité dans le
seul but d'être utile et bénéfique à tous les êtres.
L'acte lui-même doit être excellent : le bodhisattva
pratique la générosité avec honneur, de ses propres mains, le
moment venu et sans nuire aux autres. L'acte est excellent
lorsque les trois moments de la générosité sont portés par la
joie et le bonheur du don :
- avant de donner, lorsque l'on en est au stade de l'intention,
on se réjouit de cette intention même,
- au moment du don, on le fait dans l'état d'esprit de dédicace
complète,
- lorsque l'on a pratiqué la générosité, on entretient la joie et
l'enthousiasme sans aucun regret.

"Accomplir le don de façon honorable", c'est le faire
avec respect. "De ses propres mains" signifie que l'on ne dit
pas à quelqu'un de le faire, mais que l'on agit soi-même. "Le
moment venu" signifie que l'on doit juger du moment le plus
propice. On s'abstiendra de faire des offrandes d'objets
appartenant à notre famille si cela entraîne des larmes versées ;
on ne donnera pas des objets dont on n'est pas propriétaire ou
qui ont été acquis de façon malhonnête ou en dépossédant
quelqu'un.

La façon juste de pratiquer le don est exprimée à travers
trois points : la générosité sera pratiquée de façon continue,
sans partialité et elle sera menée jusqu'à ce que tous les désirs
des êtres soient parfaitement satisfaits.
2 - LA GENEROSITE QUI PROTEGE DE LA PEUR

Cette forme de don peut être la protection contre la peur
des brigands, la crainte des conditions extérieures (animaux,
maladies, menaces des éléments). L'essentiel de cette pratique
revient à protéger la vie.

En particulier, pour dissiper toutes formes de dangers et
de menaces pour les êtres, la pratique de Tara est tout à fait
excellente et puissante. De même, les pratiques comme celle de
Mahakala servent à dissiper les obstacles en relation avec le
Dharma, l'enseignement. A travers ces pratiques, on accomplit
un bienfait personnel parce que l'on trouve pour soi-même une
protection, mais on peut étendre celle-ci par la dédicace et la
force des souhaits. D'une manière générale, toutes les formes
d'activités vertueuses que l'on accomplit à travers le corps, la
parole et l'esprit ont pour résultat de nous protéger de toutes
les souffrances du samsara.

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3 - LA GENEROSITE DU DHARMA

L'objet de
la générosité

Il s'agit de ceux qui écoutent avec dévotion, intérêt et
respect les enseignements du Dharma.

L'intention

A - L'INTENTION NEGATIVE A ABANDONNER

C'est lorsque l'on enseigne le Dharma dans le but d'obte-
nir la réputation, des honneurs, la célébrité ou des biens
matériels. Si on enseigne le Dharma avec la volonté d'en tirer
un profit personnel, cela sera tout à fait inutile. Le Dharma
complètement pur sera souillé par cette motivation impure et à
travers un tel acte on créera simplement un karma négatif.

On expliquera donc l'enseignement avec une pensée libre
de toute attitude matérialiste. C'est ce que tous les Bouddhas
ontmontré.

B - L'INTENTION BENEFIQUE A PRATIQUER

C'est l'intention qui repose sur la compassion envers tous
les êtres. "Afin de mettre un terme à la souffrance, on fera don
de l'enseignement dans le monde, sous une forme accessible."

La matière même
de l'enseignement

L'enseignement doit être donné d'une manière qui soit
complètement en accord avec les Soûtras, la parole du
Bouddha. Il ne doit rien y avoir de contradictoire. Ceci est
exprimé dans "Les Terres de Bodhisattva" : "L'enseignement
doit être donné de telle sorte qu'il ne soit pas en contradiction
avec la substance même du Dharma, d'une façon qui soit en
accord avec les différents moyens de l'exprimer et qui ait pour
but d'amener les êtres à s'en tenir de façon parfaitement pure
aux différentes formes d'entraînement destinées à acquérir une
attitude juste."

La façon d'enseigner

Lorsqu'il est requis un enseignement, on n'enseignera pas
tout de suite. "Le don de l'enseignement ne doit pas être fait
immédiatement... Quand on vous demandera un
enseignement, vous direz : - Je n'ai pas encore bien étudié le
sujet. Ce sera la première réponse à donner." (Soûtra) Par
contre, s'il n'y a pas de requête d'enseignement, mais que l'être
rencontré paraisse digne de recevoir l'enseignement, il est alors
bon d'enseigner.

En ce qui concerne l'environnement, on choisira un
endroit convenable, qui soit à la fois ouvert, vaste et plaisant à
l'esprit. Un texte dit : "On enseignera dans un lieu propre,
agréable à l'esprit, sur un siège vaste et confortable." On
s'installera sur un trÙne recouvert de brocart. On devra se
laver, porter des habits seyants, être pur intérieurement et avoir
une conduite en accord avec les enseignements, pour pouvoir
les donner. Ensuite, chacun s'étant installé autour du trÙne,
avant de donner l'enseignement on devra réciter des prières
pour dissiper les interférences. La récitation du mantra a le
pouvoir d'écarter toutes les forces qui créent des obstructions à
l'explication du Dharma, à des lieues et des lieues de distance.
Gr‚ce au manLra, même des êtres négatifs qui ne sont pas
expulsés ne peuvent plus nuire à l'enseignement.
L'enseignement sera donné clairement et à voix modérée.
Tout ceci, dit Rinpoché, montre que celui qui donne
l'enseignement doit le faire de façon pure, avec une bonne
motivation. Il doit aussi enseigner avec joie, en voulant créer
quelque chose de bénéfique. On pratique ainsi la généroité sans
rien attendre en retour, ni gratitude, ni rien d'autre ; on agit
sans avarice ni mesquinerie, dans un état d'esprit joyeux et
enthousiaste.

Tous ces dons ne sont pas perdus pour nous-même et
mûriront au contraire dans le courant de notre être. Tout ce
que nous donnons aux autres crée une énergie positive dont
nous expérimenterons le résultat au moment de la mort où elle
s'actualisera en un ensemble de conditions et de situations
favorables à notre propre libération. C'est comme un investis-
sement que l'on ferait dans une banque et dont on toucherait
les intérêts le moment venu ! A l'inverse, au moment de la
mort, nous serons obligés de nous séparer de toutes les choses
que nous essayons d'obtenir et de conserver jalousement. Rien
de cela ne pourra être emporté avec nous ; ces biens
deviendront la possession des autres.

La générosité matérielle aide les êtres à goûter au bonheur.
C'est une forme de générosité relative, liée simplement à cette
existence. La générosité du Dharma est celle du don ultime qui
donne les moyens d'atteindre l'Eveil. La générosité qui protège
de la peur peut se comprendre aux deux niveaux précédents :
relatif et ultime.

V) La façon de faire s'accroître la générosité


On ne doit pas laisser s'amoindrir les différentes formes de
générosité. Au contraire, on doit connaître les moyens de les
fortifier. Le Bouddha a dit, dans le Soûtra "L'éclair du bodhi-
sattva" : "Sharipoutra, le bodhisattva expérimenté ne laissera

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pas sa générosité s'affaiblir, mais l'accroîtra. Il la développera
par trois moyens : par la force de la sagesse primordiale, il la
rendra supérieure ; par la force de la conscience transcendante,
il retendra ; par la force de la dédicace, elle deviendra incom-
mensurable."

1 - LA FORCE DE LA SAGESSE PRIMORDIALE

Cette force va rendre la générosité complètement pure des
trois cercles, car elle s'appliquera dans leur parfaite connais-
sance. Les trois cercles signifient qu'on reconnaît l'essence de
la générosité comme vacuité, qu'on est conscient que la cause
est en elle-même illimitée et que l'on discerne le fruit comme
parfaitement immaculé. L'activité qui est libre des trois cercles
est celle qui comprend que l'auteur de la générosité est sembla-
ble à une illusion n'ayant pas de nature propre, que la
substance du don est semblable à un rêve, ainsi que l'objet vers
lequel est dirigé la générosité. Donc, entre celui qui donne,
l'objet du don et celui qui reçoit, il n'y a aucune différence, ils
sont tous vides et parfaitement non duels.

2 - LA FORCE DE LA CONSCIENCE TRANSCENDANTE

Afin que le mérite de la générosité se développe sans cesse,
on la pratique avec la deuxième force, celle de la conscience
transcendante qui lui permettra de se répandre. Celui qui
pratique la générosité doit avoir pour seule intention d'établir
tous les êtres dans l'état d'Eveil. Au moment de l'acte lui-
même, il doit être dépourvu d'attachement. Enfin, lorsque la
générosité est accomplie, il doit être libre d'attente et d'espoir
quant à un résultat ou un retour de son acte. Lorsque ces trois
aspects sont présents, le mérite créé par la générosité peut
réellement se répandre et se développer.

Le Bouddha dit : "Ayant pratiqué la générosité, le
donateur ne demeurera pas attaché à l'objet offert, ni
n'attendra de résultat pour lui-même. Le bodhisattva habile
fera don de tout ce qu'il est bon de donner et, de cette manière,
par cette forme de don éveillé, tout ce qu'il offrira deviendra
incommensurable. ' '

3 - LA FORCE DE LA DEDICACE

Le bodhisattva qui dédie sa générosité à l'insurpassable
Eveil de tous les êtres rend cette pratique incommensurable.
Par la dédicace, non seulement la vertu qui est créée va s'ac-
croître, mais elle va devenir intarissable. Le Bouddha dit à
Sharipoutra : "De la même manière que, si on fait tomber une
goutte d'eau dans l'océan, cette goutte va y demeurer de façon
inépuisable jusqu'à la fin de l'océan lui-même, tout acte de
vertu parfaitement dédié à l'Eveil demeurera totalement
indestructible jusqu'à l'obtention de l'Eveil même."

VI
La façon de rendre la générosité parfaitement pure

"Par la conduite qui s'appuie sur l'essence de la vacuité
et de la compassion, le mérite est rendu parfaitement pur." La
générosité qui repose sur la conscience de la réalité ultime ne
conduira pas au cycle des existences. Parce qu'elle s'appuie sur
la compassion, elle ne conduira pas vers les véhicules
inférieurs. Au contraire, par la présence de la vacuité et de la
compassion indissociables, la pratique de la générosité conduira
à l'obtention de "l'au-delà-de-la-souffrance-qui-est-sans-
demeure."

- La façon de s'appuyer sur la vacuité pour pratiquer est
décrite dans un Soûtra : "La vacuité de la générosité doit être
pratiquée en s'appuyant sur les quatre sceaux." Ces quatre
sceaux sont la compréhension que notre propre corps, tous les
objets "extérieurs", les êtres à qui on donne et tous les
phénomènes î y compris le Dharma et l'Eveil î sont de la
nature de la vacuité, sont vides en essence. C'est à travers la
compréhension de ces quatre sceaux de la vacuité que l'on
pratiquera la vraie générosité.

Le deuxième point sur lequel on s'appuie, c'est la
compassion. La compassion est le fait de pratiquer la généro-
sité parce que toutes les formes de souffrance qu'expérimen-
tent les êtres, d'une façon générale ou particulière, ne sont pas
supportables. C'est pour cela que le bodhisattva agit de façon
généreuse envers eux.

VII
Le fruit de la pratique de la générosité

1- AU NIVEAU ULTIME

Ce fruit se situe à deux niveaux : ultime et relatif.
Au niveau ultime, la pratique de la générosité conduit à la
réalisation de l'insurpassable Eveil. "De cette manière, le
bodhisattva qui pratiquera cette vertu transcendante de la
générosité, l'ayant amenée à sa complète maîtrise, manifestera
l'Eveil parfaitement pur et insurpassable qui est la réalisation
de la bouddhéité."

2- AU NIVEAU RELATIF

Du point de vue relatif, différents résultats découlent de la
pratique de la générosité, suivant les types de don.
En ce qui concerne la générosité matérielle, le résultat sera
de jouir de toutes sortes de possessions, de façon excellente,
sans même avoir besoin d'aspirer à cela.
Par la générosité, on rassemblera les êtres autour de soi et
on développera les capacités d'une pratique qui s'appliquera à
les conduire sur le chemin de l'Eveil.
"Le bodhisattva qui pratique la générosité coupe toute
possibilité de renaître dans le monde des esprits avides et
empêche également toute expérience de pauvreté et de dénue-
ment physique ou moral ainsi que tout ce qui est lié aux
manifestations des émotions perturbatrices... Dans tout ce
qu'il entreprendra, il jouira de possessions et de biens
illimités... Par sa générosité, il obtiendra la capacité de faire
mûrir les êtres, c'est-à-dire de les amener à se libérer de leurs
souffrances et à atteindre le bonheur... Celui qui offre de la
nourriture obtient la force. Celui qui offre des vêtements
obtient un teint excellent. Celui qui offre des moyens de
locomotion obtient le bonheur. Celui qui offre des lampes
obtient des yeux."

Par la pratique de la générosité, on acquiert les jouissances
physiques et matérielles.

Si on protège les êtres de la peur, on ne peut plus être
perturbé par les Maras, les démons intérieurs, ni par toutes les
formes d'obstacles extérieurs qui peuvent nous nuire.

Par la pratique de la générosité du Dharma, on obtient
rapidement la capacité de réaliser l'Eveil en rencontrant et
s'associant à des Bouddhas. Tous les souhaits s'accomplissent
rapidement. "Celui qui fait offrande pure du Dharma, celui-là
s'associera aux Bouddhas et tous ses désirs seront exaucés."

(A suivre : l'Ethique) 21

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