"Le bouddhisme est un mode de vie par lequel nous développons les qualités de notre esprit.
C’est un mode de vie très particulier, car c’est une façon d’atteindre le bonheur
sans nuire à autrui."

LE XVIIe GYALWA KARMAPA, TRINLEY THAYÉ DORJÉ

Revue "Tendrel"

Retrouvez sur cette page des enseignements parus dans la revue "Tendrel" éditée par Dhagpo Kagyu Ling jusqu'en 2002.

LE REFUGE

Tendrel 1986

Randjoung Rigpé Dordjé


Le refuge

Tous les êtres individualisés nés dans l'une des six conditions d'existence Sont continuellement tourmentés par les passions. Ils ont perdu leur chemin, aveugles devant l'abîme, sans jamais Pouvoir découvrir la protection qui les guiderait. C'est pour eux qu'est présent le Pouvoir du refuge.
Ce Pouvoir ne réside qu'en les trois sublimes, à l'exclusion de toute autre source de refuge.
C'est pourquoi il est nécessaire de prendre refuge en les Trois Rares et Sublimes (les Trois joyaux).

La manière de prendre refuge

Si l'on est atteint d'une fièvre et que l'on reste dans l'ignorance des qualités des Trois joyaux, il est impossible que la fièvre disparaisse. La raison de cela tient à la nature des Trois joyaux :
Le Bouddha: l'Eveil: l'accomplissement ultime et parfait de l'abandon et de la réalisation. Le Bouddha est caractérisé par la Conscience Primordiale de la nature essentielle des phénomènes et par la vibration de la Parole non-duelle.
Le Dharma: la Voie qui est signifiée par la Vérité de la cessation, est caractérisée par la pacification des termes du sujet et de l'objet, en quoi il est exempt d'attachement, et par l'Activité Illuminée qui cause la cessation des passions.
Le Sangha, la Noble Communauté: ce sont ceux qui ont une connaissance exacte de la manière d'atteindre le but, qui s'appliquent à le réaliser en s'engageant dans l'action vertueuse initiale, intermédiaire et ultime.
Par la compréhension des qualités des trois lieux de refuge s'élève une foi indéfectible. Le refuge est issu de cette foi envers les objets authentiques, agissant comme le remède effectif. C'est ce que recouvre l'expression: être pris par la Compassion des Trois Rares et Sublimes.
Une fois que l'on est pris par cette Compassion des Trois Joyaux, on n'en est plus jamais exclu. Cette Compassion qui prend les êtres est pourvue de l'activité Illuminée qui ne rejette jamais car elle est complètement affranchie de la dualité du sujet et de l'objet. Pour cette raison, elle est comparée à la mâchoire d'un crocodile.

Les bienfaits du refuge

Cette foi du fond du cœur est le remède approprié. Celui qui lie son être par le v<ru de Refuge et prend effectivement refuge, ferme les voies qui mènent aux abîmes des passions et qui provoquent la naissance dans les six classes d'êtres, que ce soit les états infortunés ou les conditions supérieures. Le fil de la Voie de la Libération est parfaitement tenu.
Ainsi, celui qui engendre en lui-même le vœu authentique du Refuge trouve une protection absolument infaillible contre toutes les souffrances.
Développant cette conscience, il pénètre complètement le sens du vœu de Refuge. En conséquence, les situations négatives n'apparaissent plus comme telles en lui. Au contraire; les conditions adverses s'élèvent comme des alliées. Les maladies, les démons virulents, les persécutions et autres manifestations, lorsqu'elles adviennent, sont connues comme la maturation de causes antérieures ou les actes accumulés sous l'influence de l'ignorance. Il ne demeure plus dans l'être de lieu où la souffrance se fixe.

C'est par la confiance en l'inéluctabilité de la rétribution karmique que ces circonstances apparaissent comme des alliées.
Lorsque quelqu'un prononce des paroles désobligeantes à notre égard, attribuons-nous en le blâme et voyons cela comme bénéfique. Lorsque nous sommes l'objet de paroles élogieuses, soyons confiants en les Trois Joyaux et développons davantage notre foi.
Bon ou mauvais, quoi qu'il s'élève, quoi qu'il apparaisse, tout cela doit être compris comme une interprétation projetée par notre mental. La nature de toute manifestation est la projection confuse issue du karma. Fort de la conviction de l'absence d'origine intrinsèque, même s'il s'élève de mauvaises pensées telles que désir ou haine, gardons la tête froide sans nous laisser aller à les suivre.
En demeurant sur la voie pure de la patience, nous tiendrons avec certitude le fil du chemin du non-retour.
Pour cela, il nous faut reconnaître la spécificité des lieux de refuge, qui distingue la position bouddhiste des théories hétérodoxes. Le Bouddha l'exprime ainsi: "Bien que l'on conçoive l'existence de tous les vœux, ils n'existent pas s'ils ne passent pas par le refuge. " Méditons-en le sens dans cet esprit.

Fondements et préliminaires au refuge

D'une manière générale, la totalité du corps des quatre-vingt-quatre mille enseignements est incluse dans l'entraînement au refuge, parachèvement complet de l'apprentissage spirituel. L'orientation unique du Dharma, c'est la mise en application du refuge :
une seule orientation dans les préliminaires: pénétrer le sens du développement de l'esprit d'Eveil ;
une seule orientation dans le corps de la pratique: pénétrer le sens de cette phase centrale ;
une seule orientation dans le fruit: assumer la maîtrise de l'Activité Eveillée résultante.
C'est la raison d'être du recueillement méditatif.
Puisque tous les enseignements du Bouddha se résument à l'intégration du refuge, n'en diminuons pas l'importance, mais aspirons vraiment à le tenir comme le cceur de la méditation. Ce faisant, nous deviendrons des fortunés capables de mettre en pratique l'essence du profond et saint Dharma.

Le précieux corps humain

Considérons au moyen de la cause, de l'exemple et du nombre ce sublime support : le précieux corps humain doté des libertés et des acquisitions, si difficile à obtenir.

Maintenant que nous jouissons de cette opportunité exceptionnelle, ne laissons pas cette existence humaine s'épuiser en vain, mais soyons conscients de la nécessité de pratiquer l'essentiel, le Saint Dharma qui lui donne son sens. Développons une aspiration fervente, ne restons pas à temporiser, c'est tout de suite qu'il faut pratiquer.
Pourquoi cela ?
Tous les phénomènes extérieurs et intérieurs, le réceptacle et l'essence, n'existent qu'en mode dépendant, conditionné. I1s n'ont pas d'existence autonome ou réelle, pas même pour un instant. Spécialement la vie des êtres est transitoire comme une bulle à la surface de l'eau, et il est certain que la mort frappe soudainement.
A ce moment, ni nos proches, ni nos serviteurs, ni nos richesses, ni nos biens, ni personne ne nous est plus d'aucune aide. Lorsque nous errons seul dans l'état intermédiaire, rien, hormis le Dharma, n'a plus de réelle utilité.
Il faut pratiquer dès à présent, avec grande diligence. A la mort, la force du karma rend impossible la concrétisation du moindre désir. Personne ne peut empêcher l'accomplissement inéluctable de la dynamique de la loi de causalité. Nous voyons la pleine maturation (de nos actes), et le fruit suprême, médiocre, moyen ou inférieur devient manifeste. Les actes issus d'intentions vertueuses ou négatives produisent un résultat tangible. Par conséquent la cause (à cultiver) est la pensée positive, fondée sur la compréhension authentique.

Le karma

La compréhension authentique est l'intelligence parfaite qui, remontant la chaîne des causes et des effets, perçoit clairement le mode de fonctionnement du karma, comment il est fondé sur l'ignorance qui saisit un soi là où il n'y a pas de soi.
Cette conscience juste du fonctionnement du karma conduit à la conception de la vertu. La production de cette conception est un acte mental qui, ensuite, s'exprime en l'acte physique ou verbal, est-il dit.
La compréhension authentique engendre la disposition d'esprit qui inscrit l'activité du corps et de la parole dans une dynamique positive. La reproduction de cette cause donne un résultat: l'obtention d'une condition supérieure d'existence et de l'état de certitude excellente.
Cette intention, en vertu de la loi de rétribution karmique, rend l'acte positif au début, au milieu et à la fin et, en conséquence, est appelée: intention positive.
Le Bouddha dit encore: "l'adoption de cette intention établit sur la voie du Dharma, selon les trois véhicules. Sa mise en pratique manifeste les causes et effets de la libération ".
En s'appuyant sur la loi infaillible de la cause et de l'effet, on s'appliquera à faire s'élever les huit qualités des naissances supérieures: « Par l'abandon de la malveillance; la longévité; par le fait d'honorer le Lama; une filiation supérieure par la réunion de l'accumulation de mérite de grandes possessions par le fait de ne prononcer que des paroles pures; la crédibilité et ainsi de suite ... ". Mettons en pratique ces paroles dignes de foi.
Ces qualités sont les facteurs propices à la libération. Comme l'énonce la loi de causalité :
"La cause est la pensée erronée qui s'élève de l'inconscience. "
"La production d'un état d'esprit négatif est le mode d'expérience des six classes d'existence. "
"I’adhésion à ce mode d'expérience est dénommée: samsara. La nature du samsara est souffrance. "
De quelle manière ?
Le fruit est le résultat inéluctable d'une cause antérieure. La cause, ce sont les distorsions mentales qui, par leur répétition, conduisent au fruit: les six conditions d'existence et leur souffrance dont il est impossible de prévenir la manifestation. Pour cette raison, les grands maîtres Kagyu accordent une grande valeur à la loi de rétribution karmique et en font le cœur  de leur méditation. La raison de cette insistance tient à la nature du samsara qui ne peut jamais transcender réellement les trois types de souffrance.

Futilité du samsara

Quelle que soit la condition supérieure ou infortunée dans laquelle on prend naissance, l'attachement à la réalité de l'expérience immédiate la transforme en seule souffrance. "II faut trancher irrémédiablement les amarres de cette vie. "
Cette pensée est commentée ainsi par le Vénérable Mikyeu Dordjé
 "L'essence du détachement est le Corps du Glorieux Lama. " Il est essentiel de s'établir dans la Noble Présence du Corps du Lama, d'où viendra le détachement du samsara. Le même dit encore: "Lorsque la Réalité est réalisée, la cause et l'effet s'élèvent comme Vacuité. " C'est-à-dire que dans la nature de la Réalité (dharmata, l'essence des phénomènes) réside le mode d'être ultime.
« Lorsque l'être des phénomènes est réalisé, la vacuité s'élève comme cause et effet. " C'est-à-dire que le mode de manifestation est la radiance de l'état de nature.
En l'état de conscience qui n'est pas illusionné par le mode apparent de la manifestation mais en perçoit la dimension réelle, réside le fruit: le Corps d'Eveil et la Conscience Primordiale. L'état de conscience qui ne réfute pas le mode apparent a pour fruit la souffrance des conditions infortunées.

Le Bouddha a défini ainsi le champ des défauts et des qualités. Il est celui qui a rejeté tous les obscurcissements de la saisie dualiste et qui a parachevé la sagesse des deux connaissances.
La compréhension de la dimension véritable des qualités de l'Eveil, comme perfections des excellences d'abandon et de réalisation, engendre une conviction profonde: la reconnaissance de la supériorité du Bouddha par rapport aux enseignants hétérodoxes. On prend alors un refuge sincère dans cet Enseignant exceptionnel. On prend refuge de tout son être, certain qu'il n'existe pas de source de protection supérieure, sans plus chercher d'autre asile. Se diriger vers le refuge pourvu des quatre éléments nécessaires, c'est le refuge parfaitement qualifié.

L'esprit d'éveil

Comprendre ce qui est utile et ce qui est préjudiciable et, de là, aspirer définitivement à la libération du samsara est décrit comme "tourner l'esprit vers le Dharma ". Ensuite, ce Dharma doit devenir le Dharma réel, c'est-à-dire le chemin. Pour cela, il est nécessaire de pratiquer dans le courant de son être les deux aspects du précieux esprit d'éveil. Si l' on en souhaite une explication extensive, on se référera aux "Six Ouvrages "de la tradition Kadampa, ou à la "Grande Voie graduée" du Seigneur Tsongkhapa, ou encore au 'Joyau, ornement de la libération " de l'incomparable Gampopa.
En bref, l'esprit d'éveil (Bodhicitta) a deux aspects: relatif et ultime. L'aspect relatif est composé de l'Amour altruiste et de la Compassion. C'est aussi l'aspiration et l'application.

L'esprit d'aspiration : c'est le développement de l'idée suivante :
"par le rappel de la bonté de tous les êtres, que je sais être mes mères, je jèrai en sorte qu'ils obtiennent l'état d'omniscience. "

L'esprit d'application : c'est prendre en main ce souhait d'obtention de l'omniscience en s'engageant dans tous les aspects de la pratique du Dharma. Cette mise en ~uvre se fait selon trois degrés: personnel, bodhisattva et tantrique. L'essence de la voie de la libération personnelle est le renoncement, à travers les trois phases de préparation, pratique véritable et conclusion.
L'essence de la voie du bodhisattva est la compassion, à travers les trois phases de préparation, pratique véritable et conclusion.
L'essence de la voie tantrique est la conscience pure, à travers les trois phases de préparation, pratique véritable et conclusion.
La spécificité de chacune des trois voies repose sur ce qui est à cultiver sur la voie.



Les particularités de chaque voie sont respectivement abandonner, transformer connaître. Le fruit de ces aspects portés à leur maturité est l'esprit d'Eveil ultime : sans origine, sans cessation, inconcevable, immaculé, Clarté lumineuse.
En résumé, c'est la réalisation véritable de la nature de la Conscience Primordiale de la Sphère des phénomènes (dharmadathou), qui transcende toute expression et tout raisonnement, et son intégration à travers une expression conventionnelle. Par l'adhésion totale à ce précieux esprit d'Eveil d'aspiration, quelle qu'en soit l'expression pratique, le résultat s'accomplit: le pratiquant demeure sur la voie, il est devenu comme un vaste trésor inépuisable. Ce qu'exprime Shantideva dans l'Introduction à la conduite des Bodhisattvas :

« Lorsque quelqu'un assume parfaitement cette intention,
Dès cet instant, qu'il dorme ou qu'il soit insouciant,
S'élève une force de mérite continuelle,  
Semblable à l'espace. »




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