Voyage au cœur des tantras

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Jour 1 : tantra

Une des qualités de lama Jampa Thayé, c’est sa clarté. Comme ce stage de 4 jours a pour thème les conditions du vajrayana, il commence par définir ce véhicule : « La base, le chemin et le but sont un même continuum. Il n’y a pas de distinction entre un être et le but à atteindre, en terme de nature. Dès le début, l’union de la vacuité et de la luminosité est présente en chacun. Nous possédons tous cette réalité fondamentale ; nous devons la dévoiler, ce qui est le but du chemin. Le vajrayana est appelé le véhicule résultant, car on part du fruit pour dévoiler ce qui est présent à la base. » Certes, c’est dense ! Mais la réunion de ces quelques notions donne une idée juste et précise de ce que sont les tantras.
La base de cette transmission est un commentaire du XIIIe siècle, qui a pour auteur Djétsun Drakpa Gyaltsen, un des pères de la lignée sakya. Il explique en détail les engagements de celui qui souhaite parcourir la voie bouddhique en utilisant les moyens du vajrayana. Lama Jampa transmet progressivement la lecture rituelle, page après page et commente chaque partie du texte. C’est donc une transmission qui s’installe dans la salle d’étude bondée. Transmission qu’il a lui-même reçue il y a 25 ans.

Aujourd’hui, nous avons abordé le contexte de l’enseignement et la phase introductive du texte. Lama Jampa Thayé explique pourquoi l’hommage qui introduit chaque commentaire nous aide à écouter avec un état d’esprit juste et comment la promesse de composition (les raisons de la rédaction du commentaire) donne le sens du texte. Demain nous entrons dans le vif du sujet : les 14 transgressions racines des engagements du vajrayana.

Jour 2 : samaya

Les samayas sont les engagements pris par un pratiquant lorsqu’il reçoit une initiation du vajrayana. Au fur et à mesure de la réception de l’initiation qui ouvre à la pratique d’un yidam (une divinité de méditation), le pratiquant s’engage. À quoi ? À préserver des états d’esprits spécifiques et des attitudes, qui garantissent le progrès dans la méditation. Le samaya a comme support l’esprit !

Lama Jampa Thayé et Audrey Desserières

Comme à son habitude, lama Jampa Thayé fait preuve de cette précision qui dissipe les malentendus : les samayas dont nous parlons ici correspondent aux initiations des tantras supérieurs, transmises complètement. Or une telle initiation n’est donnée que si le disciple présente les conditions pour réellement mettre en pratique ce qu’il a reçu.
De façon générale, ce qui est transmis comme initiation, ce sont des djenang c'est-à-dire des autorisations de pratiquer. Cela donne la ressource nécessaire pour accomplir une pratique quotidienne et en récolter les fruits, sans être concernés par les engagements exigeants que sont les samayas.
Comme le fait remarquer lama Jampa : transgresser les samayas a des conséquences importantes et fortes, mais il ne s’agit pas là d'une punition. C’est une conséquence naturelle, un effet spirituel lié à une pratique spécifique.
Nous attendons la suite…

Jour 3 : exploration

Il nous faudra 3 ans, à raison de 4 jours par an, pour terminer le texte. Lama Jampa ne laisse rien de côté : chaque mot est lu et ce qui doit être expliqué l’est. Cela s’appelle un lung-t’i en tibétain : une lecture rituelle commentée. La transmission est double : celle du texte lui-même et celle des instructions qui éclairent le sens.
Étudier un tel commentaire extensif permet de prendre le temps d’expliquer les détails. Par exemple, parlant des actes et de leurs conséquences : ce n’est pas uniquement l’acte en lui-même qui compte, mais aussi son objet, sa fréquence et la manière dont il est accompli. Cela donne à la notion de karma précision et pertinence.

Si je pratique la générosité par le don, le résultat karmique sera différent selon ce que je donne, à qui je le donne, la manière dont je donne et la fréquence du don. C’est ainsi que, partant des engagements du vajrayana, nous explorons maints aspects du Dharma. Nous sommes aussi revenus à la métaphore médicale : le Bouddha comme un médecin, le Dharma comme un médicament et la pratique comme le fait de se soigner. La maladie ? C’est la méprise bien sûr, celle qui nous empêche de vivre les choses telles qu’elles sont. Prendre le temps de réfléchir à cette image nous permet de comprendre combien parfois nous nous trompons sur le sens du Dharma. Pratiquer le Dharma n’est pas autre chose que se libérer de la souffrance et de ses causes.

Jour 4 : vœux

Aujourd’hui, nous avons abordé la cohérence entre les différents niveaux d’engagements. Le texte nous montre comment l’éthique qui consiste à arrêter de nuire fonde les vœux de bodhisattva. Il est vrai qu’on ne peut s’engager à accomplir le bienfait des êtres que si on a décidé de ne plus leur nuire. Cette éthique de la libération associée à celle du bodhisattva permet de s’engager dans le vajrayana et de générer ce qui est appelé « la vision pure ». Lama Jampa l’explique : la vision pure consiste à développer une perception sacrée des phénomènes et des êtres.

La pratique des tantras permet de cultiver la pureté fondamentale des corps, parole et esprit d’un bouddha. Cette pureté est déjà présente en tous les êtres, il faut l’actualiser, c’est le sens des tantras. 

Nous nous arrêtons au beau milieu d’un chapitre, au seuil d’un nouveau paragraphe. Comme prévu, nous en sommes au tiers du texte. Rendez-vous est donc pris pour l’année prochaine.

Lama Jampa conclut en expliquant que le Gyalwa Karmapa lui a demandé d’aider Dhagpo, ce qu’il fait avec enthousiasme. Quelque chose nous dit que cette relation fertile a encore beaucoup à nous révéler.

Puntso
Responsable du programme de DKL